NOUVELLE VAGUE, 25 ANS : LA SAGA

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Par un beau jour d’octobre 1994, un mini-fanzine musical fait son apparition dans la région. C’est le point de départ d’une belle aventure humaine guidée par la passion de la musique et l’envie de la partager…

La Genèse

Au début, il y eut Philippe Perret. Jeune homme audacieux au regard tourné vers l’horizon depuis sa ville natale et chérie de Vence. Il était alors promis à une possible carrière de guitar hero régional mais une profonde injustice le fit tout plaquer du jour au lendemain. En effet, au vu de ce que la presse régionale de l’époque diffusait et lui aficionado de la presse écrite nationale, il ne put plus longtemps contenir son désarroi de ne pas être tenu au courant de quels groupes jouaient dans les villes avoisinantes. Son sang ne fit qu’un tour et il décida sans ciller de briser sa guitare sur scène en un torrent de flammes devant ses fans déchaînés (une information qui reste néanmoins à vérifier) pour se jeter à corps perdu dans ce qui deviendrait alors l’Œuvre de sa Vie (mais cela, il ne le savait pas encore).

New wave

Armé de seuls son courage et son grain de folie, il s’empressa de recruter d’autres âmes bienveillantes qui seraient prêtes à délaisser leurs consoles de jeux vidéos pour donner charitablement de leur temps et apporter chacune leur pierre à cet édifice alors encore invisible. N’écoutant que leurs cœurs de jeunes idéalistes comme aveuglément guidés par une mission divine, c’est à l’automne de l’an de grâce 1994 qu’apparaît la première édition de cette publication désormais sacrée et révérée: Nouvelle Vague (qui, hormis le clin d’œil cinématographique, est aussi un hommage à la new wave, style musical de prédilection de Philippe, ainsi qu’aux vagues azuréennes (car il est également poète).

Fanzine

Tout d’abord d’aspect austère et minimaliste (c’est-à-dire une feuille A4 en noir et blanc), Nouvelle Vague est ce qu’on appelle à l’époque un fanzine, un magazine conçu de manière artisanale par des fans. Le groupe d’illuminés mené par la vista imperturbable de leur gourou ne rechigna pas à imprimer un millier d’exemplaires dudit document et le distribuer a la mano dans tous les disquaires, salles de concerts et autres lieux musicaux; un format et un procédé qu’ils répèteront chaque mois une année durant, apprenant ex nihilo sur le tas la réalisation d’un magazine et sondant par la même occasion l’existence d’un possible public (n’oublions pas aussi qu’en ce temps-là, Internet n’était pas encore présent dans nos chaumières et que ces activités pouvaient fortement réduire le taux de suicide chez les jeunes).

Les goûts et les couleurs

C’est à ce moment que le magazine en devint un: des pages en plus, d’abord seize puis progressivement vingt-quatre, et même une révélation bien connue de ceux qui possédaient une télévision dans les années 60: l’arrivée de la couleur chez Nouvelle Vague à la fin du XXème siècle ! Plus rien ne saurait alors arrêter l’irrésistible ascension des troupes de Philippe, galvanisées par cet accès au professionnalisme et l’assurance sans faille de leur maître à penser. Qu’importe que le moteur économique donnant vie au journal soit très majoritairement constitué d’annonceurs publicitaires, la petite équipe se débrouillait pour les solliciter et arrivait ainsi chaque mois à boucler son numéro, lui permettant finalement de le distribuer jusque dans les contrées les plus éloignées de Vence (le Var, et même les Bouches-Du-Rhône).

Passion musique

Les pigistes amateurs en tout genre défilèrent, animés par la même soif inétanchable pour la musique, Nouvelle Vague vit fleurir les rubriques, et devant la recrudescence de travail, deux hommes clé firent leur apparition au siège de la rédaction (car ils avaient désormais un bureau, symbole ultime du professionnalisme) à l’aube du XXIème siècle: le premier, ce fut David Bartoli, un Cannois fougueux qui chroniquait déjà au magazine depuis fin 1998 suite à une rencontre avec Philippe lors d’une soirée fiasco organisée pour la sortie d’une compilation d’artistes locaux. Ses qualités indéniables en relations publiques (au moins une phrase inachevée par personne et hop il disparaît, mais on ne pourra pas dire qu’on ne l’a pas vu) le transforment progressivement de ravitailleur d’alcool pour la rédaction en commercial effréné.

C’est la crise

En effet, Nouvelle Vague avait de plus en plus besoin de trouver de nouveaux annonceurs, les principaux étant jusqu’alors les maisons de disques, ces dernières ayant senti le vent tourner avec la fameuse «crise du disque» qui frappa ce début de siècle. Pour sa survie, le magazine devait s’adapter ou simplement mourir. La presse écrite fut également gravement menacée par l’arrivée du haut débit; une embûche contournée par la création du site web du magazine en 2001. Le second couteau, ce fut Matthieu Bescond. D’abord stagiaire puis resté chroniqueur, ce n’est finalement qu’en 2004 qu’il obtint le titre d’homme de l’ombre et régisseur polyvalent, promu au poste de secrétaire de direction puis de gestionnaire de la rédaction, bras droit de Philippe mais jamais gauche, qui, de main de maître, renforça, avec brio, le noyau de tête du quartier général vençois jusqu’en 2010 où, tout comme David peu avant lui, il prit une autre route sans pour autant omettre de continuer à officier en tant que rédacteur bénévole, car rares sont ceux qui ont quitté Nouvelle Vague sans jamais y revenir. Qu’on se le dise !

Mutation 2.0

Après les départs des deux «historiques», se succèderont plusieurs personnes qui apporteront chacun leur pierre à l’édifice. A la rédaction : Nicolas Tarragoni, Tanja Stojanov, et Aude de Courrèges. Au commercial : Caroline Dubreuil, Rachid Derbel, Olivia Gris, Margaux Maurisset et Nathalie Ansaud. C’est en 2011 que Lyuba Sofronieva fit son apparition, d’abord stagiaire puis récemment promue au poste de responsable commerciale et communication, mais toujours chroniqueuse. Elle assume la lourde tâche de mener la traque permanente au financement. En 2012, c’est au tour de Fabrice Reybaud d’adjoindre ses services, non seulement en reprenant le flambeau de secrétaire de rédaction, mais aussi en créant le nouveau site web de Nouvelle Vague dont l’adresse s’inscrit désormais dans le logo du magazine, ce qui ne l’empêche pas, lui, de poursuivre sa quête en tant que rock star vers la célébrité qu’il mérite évidemment.

L’équipe

Puis en 2015, un tandem féminin de haut vol vint épauler Philippe. Sandra Cillo pris à bras le corps l’action commerciale, ô combien vitale pour la survie de la petit entreprise. Aurélie Kula, quant à elle, releva le flambeau de la rédaction, s’attaquant sans rechigner à la masse herculéenne de travail, sans se laisser submerger par le flot continu d’e-mails. En 2017, elle laisse sa place à la jeune (elle a l’âge du magazine…), pétillante, joviale et terriblement efficace Aurore Viberti, dont la fiabilité et la sympathie exemplaires bercent encore à ce jour les boîtes mail des chroniqueurs actuels du magazine.

Etat d’esprit

Pour être totalement exhaustif, citons également ceux qui ont occupé le poste de secrétaire de rédaction dans les toutes premières années : Jean-Sébastien Zanchi, Pierre Perraudin alias «Raoul le Chien», Michael Rochette et Vincent Paindavoine. Ayons aussi une pensée pour tous les jeunes stagiaires qui ont contribué à insuffler de la fraîcheur et ont apporté leur pierre à l’édifice. L’état d’esprit, «la chose la plus difficile à décrire et qui, quelque part, est la plus importante dans toute aventure humaine» dixit Philippe, n’a pas changé en 25 ans. Ce qui lui importait alors l’anime toujours autant deux décennies plus tard: vivre de sa passion, la partager, la diffuser le plus largement, et tout cela dans un esprit d’équipe.

Musique pour tous

Cerise sur le gâteau: rencontrer ou recevoir des messages de ceux qui ont été chroniqués et à qui cela a permis d’accéder à plus de dates de concerts, de popularité, voire de ventes de disques. Malgré le travail professionnel effectué et les difficultés rencontrées au cours de la réalisation de chaque numéro, il tient à ce que soient préservées les parts de fonctionnement artisanal des débuts: les passionnés rigoureux qui écrivent, la bonne humeur des réunions pendant lesquelles les nouveaux disques sont présentés, la distribution des magazines, toujours assurée par lui-même et son équipe, et la gratuité inchangée du magazine, le rendant ipso facto accessible à tous.

La région à coeur

Faire subsister une revue 25 ans durant, publiée chaque mois sans exception, avec le minimum absolu de subventions résultant en un financement toujours borderline, surmontant les doutes, les aléas et les articles rendus in extremis, relève tout bonnement du miracle. La persévérance, l’entrain et l’énergie positive apportés par chacun au fil du temps, en permanence ou épisodiquement, sont le secret de ce miracle, et toute cette passion est palpable à la lecture de chaque page qui a pu être publiée depuis l’existence du magazine. David, quant à lui, fait remarquer que «peu de gens se rendent compte de l’importance de Nouvelle Vague qui est très souvent le premier relai dans l’émergence de groupes locaux. Quand on fait un disque dans la région, on est sûr que Nouvelle Vague va en parler, et en soi, c’est intéressant».

Et maintenant ?

Alors, qu’espérer de plus pour les 25 années à venir ? Depuis 2012, le magazine est disponible en format poche, depuis 2013, le nouveau site web archive avec ergonomie tous les numéros publiés depuis sa création et permet de mieux relayer l’information sur les réseaux sociaux, subsistant en guise de dernier bastion au cas où le format papier péricliterait. Qu’importent les mutations de l’industrie musicale et de la technologie, Nouvelle Vague s’adaptera encore et encore. C’est que le début, d’accord ?

Christopher Mathieu

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